Il s'était pris un coup de poing. Il n'arrivait pas à y croire. Le petit Decendia se rebellait ? Sous prétexte que cette damoiselle était menacée par l'Empereur ? Bon, c'était un argument parfaitement valable. Mais tout de même.

Yami était sur le point de rendre son coup au soldat mais ce dernier détourna l'attention de l'homme pâle en lui faisant remarquer quelque chose : le fond du lac émettait une lumière rouge et le lac dans sa totalité était en ébullition. C'était pas banal.

"Dis-moi Yami... Y a des trucs comme ça dans ton monde ? C'est pas que je m'inquiète mais ça me dit rien qui vaille."

"Alors chez moi le truc le plus bizarre qui peut se passer dans l'eau c'est l'ouverture d'une porte vers le royaume des..."

La fin de sa phrase fut couverte par un grand bruit, pareil à un coup de canon. L'Empereur fut projeté en arrière par l'onde de choc mais eut le temps d'utiliser sa main pour s'agripper au sol humide qui se dérobait sous l'effet du mini raz-de-marée.

Une fois la vague passée, l'Empereur releva la tête pour apercevoir le duo qui s'approchait de lui et d'Yst, étalé plus loin dans un buisson. L'homme masqué émettait une aura des plus imposantes.

- Messieurs ? Veuillez m'excuser pour ce désagrément.

Le juron que lui adressa Yami fut d'une grossièreté telle que si l'un des généraux de l'armée de l'Empereur l'avait entendu, il aurait rougi.

L'homme en uniforme avait appelé l'autre "monsieur le directeur". Le directeur de quoi ? Du Colisée ? Vraiment ? Larbin, le nom que Yami avait attribué à l'agent Magnum, sortit un étrange objet et prit la parole pour répondre au masqué.

- Voici Yst Decendia et celui-ci il se fait appeler Yami. Souhaitez-vous connaître leur origine ? Leurs techniques de combat ? Leurs avantages ? Leurs faiblesses ?

Le dernier mot dérangea Yami. Il s'adressa au directeur.

"Alors au risque de vous décevoir je n'ai pas de faiblesses."

Puis, pointant du doigt Larbin :

"Vous devriez virer ce type."

Ce que le directeur déclara ensuite donna envie à Yami de vomir. Il leur proposait de l'argent comme dédommagement ? A lui, Yami l'Empereur Obscur, vainqueur des Kami, l'être intemporel, celui-né-du-néant, il lui proposait 100 JSS pour réparer tout ça ? Il devait plaisanter. Yami était prêt à le frapper mais quelque chose d'étrange se passa quand le masqué claqua des doigts, quelque chose qui incita Yami à ne pas l'attaquer tout de suite.

- Hmm donc, qu'en dites-vous ?

"Donnez moi quelque chose contre le mal de crâne... Ça devrait suffire."

"Désolé, Boss, mais on est pas des filles de petite vertu. Garde tes jetons, tout c'que j'aimerais c'est des vêtements secs."

Yami conclut en adressant un signe universel au duo. Il leur présenta son majeur droit tendu.

Le masqué se lança dans un petit discours. Il avait l'air assez énervé. Mais c'était normal. Il venait de rencontrer Yami après tout. Boss était déçu, il s'attendait vraiment à satisfaire les deux hommes. Vraiment ? Avec 100 pauvres JSS ? Pitoyable. Yami s'apprêtait à charrier le directeur, mais une phrase de la part de ce dernier attira son attention.

- Bien certes, je vais vous accorder ces désirs.

Yami était perplexe. Ce type se baladait avec des vêtements secs et des herbes pour le mal de crâne ?

L'Empereur comprit quand Boss fit apparaître un cercle de lumière après avoir claqué des doigts.

- Reverso !

Une fois le cercle dissipé, le directeur déclara que leur état était revenu à la normale. Il avait fait un bond en arrière d'une minute. Yami serrait les dents, passablement énervé, et alla toucher les vêtements qu'il avait posé sur les bords du lac. Secs ! Le masqué avait vraiment fait revenir leur état à la normale !

Le directeur dit ensuite au duo qu'il allait devoir les laisser. Mais c'était sans compter sur ce qui s'ensuivit. Un petit discours, encore une fois. On aurait dit l'Empereur lui-même, avec sa manie de faire la morale. Il semblait vouloir dire que si les deux hommes s'alliaient, ils seraient bien plus puissants. Cela, Yami le savait. Il avait déjà proposé à Yst de le rejoindre. Seul bémol avec ce plan : il ne serait profitable qu'au soldat, l'Empereur Obscur étant, selon ses dires, déjà invincible. Et puis, l'idée d'une alliance n'était plus au programme. Yami préférait affronter Yst en combat singulier. C'était bien plus intéressant.

Mais déjà le duo s'en allait.

- A bientôt... peut-être.

"À bientôt... "

"Salauds."

Intérieurement, le démon était furieux. Il tremblait de rage. Tout ce qu'il voulait à l'instant c'était arracher le masque du directeur pour le faire manger à son sbire. Et rendre sa droite à Yst. Mais ces projets allaient devoir attendre. Il sentait qu'il aurait des ennuis s'il s'attaquait au masqué et, vu son état de colère, s'il frappait Yst ce dernier se ferait arracher la tête. Ou un bras. Qu'importe.

Il remit furieusement le haut de ses vêtements. L'épéiste-mage s'était également muni de ses affaires avant de faire face à l'Empereur. Ce dernier avait la mine sombre. Il avait, pour la première fois depuis son arrivée dans ce monde, une envie de meurtre légitime. Néanmoins, il s'efforçait, pour Yst du moins, à ne pas exploser de rage.

"Me regarde pas comme ça, Decendia. Qu'est-ce que tu veux que j'te dise ? J'ai juste envie de les fracasser. Les deux."

Il grinçait des dents. Pour qui se prenait-il, ce masqué, à lui donner des leçons de vie ? Il allait lui montrer. Il se voyait déjà, vainqueur de 100 tournois d'affilé, massacrant le directeur avant de prendre sa place. Mais ce n'étaient la que des pensées futiles qui ne se réaliseraient jamais. Mieux valait se concentrer sur le concret. Sur ce qu'il pouvait faire, à l'instant. Il s'adressa au soldat, sur un ton calme mais dans lequel on pouvait discerner une grande colère.

"Soldat... Part devant s'il-te-plaît. Je... Je dois me défouler."

Il était improbable qu'Yst comprenne comment se sentait l'Empereur. Ce dernier, pour la première fois de toute sa longue vie, sentait qu'une personne était plus forte que lui. Cela devait être corrigé au plus vite.
L'aura sombre autour de Yami devenait plus intense. Sans même vérifier si Yst était bel et bien parti, il brandit sa main noire et la fit doubler de volume avant de donner un coup violent dans l'arbre le plus proche. De l'écorce vola. Puis il renchérit. Plus fort. Sur un autre arbre. En changeant la forme de sa main. Il était fou de rage et extériorisait sur la végétation environnante. Qui sait ? S'il faisait un usage prolongé de sa main noire, peut-être allait-il trouver un nouveau moyen de s'en servir.

Il s'était arrêté. Las ! Il ne suffisait pas de frapper des arbres pour devenir plus fort. Une réflexion était nécessaire. Il posa son poing droit sur l'écorce d'un grand arbre et se mit à maugréer.

"Ushiwaka... Art Mélodia..."

Il donna un coup de poing.

"Amaterasu... Borg..."

A chaque nom, un nouveau coup. Comment avait-il fait, il y a de cela bien longtemps, pour vaincre la déesse du soleil ? Il avait son ancien corps, bien sûr, mais il y avait autre chose. Une astuce, quelque chose...

"Boss... Et..."

Le coup qui vint fut des plus violents. Il garda sa main à moitié enfoncée dans l'arbre.



"Yst Decendia."

Il ne pouvait pas rester ainsi. S'il continuait de stagner, jamais on ne dresserait de statues de lui. Jamais son nom ne serait retenu. Jamais il ne pourrait vaincre les meilleurs. Jamais...

Il se souvint. Il avait la solution. Quelque chose qu'il avait déjà utilisé par le passé pour vaincre Amaterasu. Il écarta sa main du grand végétal et l'observa pendant quelques secondes. Une seconde forme.

Il ferma les yeux et se mit à se concentrer. Il essayait de reproduire ce qu'il ressentait quand, dans son ancien corps, il avait changé de forme. Le résultat apparut après une minute de concentration. La main noire avait pris la forme d'une sphère et les marques rouges qui la parcouraient devinrent vertes. Un rictus déforma le visage de Yami. Lentement, l'orbe noire et verte se sépara en cinq fragments qui se mirent à graviter autour de l'Empereur. Ce dernier observa un instant l'étrange dans aérienne qui se déroulait autour de lui. Puis, avec un petit rire, il rassembla les morceaux de la main.

"Le vent tourne. Mon temps est venu, semblerait-il."

Il éclata de rire avant de tranquillement reprendre la direction du Colisée. Tout allait pour le mieux.