Voyant le regard d’Yst revenir à la normale, et non aussi sombre qu’à l’accoutumée, Kota se détendit, expira un grand coup, comme pour se libérer de la pression qu’il avait éprouvé depuis son arrivée ici, il n’y a de cela que quelques minutes, aussi étonnant que cela puisse paraître, puis, une fois ce petit rite accompli, il s’approcha de Yst, agenouillé aux côtés du cadavre, adressant une prière à Naga, et se remit à creuser la tombe, qui avait encore besoin de plusieurs minutes, voir heures, avant d’être terminée, surtout à la main…

« Yst, tout à l’heure, vous avez dit que vous étiez partis après moi, mais vous êtes arrivés, au contraire, avant moi, comment est-ce donc possible ? De plus, si ce que vous dites est vrai, cela veut donc dire que la Sainte-Reine Emmeryn est morte, et que Chrom, ainsi que ses veilleurs, ont assurés, seuls, la protection du pays, tout en engageant une bataille contre Grima, le dragon déchu, s’étant réveillé après un millénaire passé à être dans un état de léthargie ? »

A ces mots, Kota pris conscience de ce que l’éveil de Grima signifiait, le désordre et le chaos, après tout, si de vulgaires disciples avaient pu réduire en cendres un village entier, que pourrait donc faire une divinité aussi sombre que Grima ?

* Pitié, Naga, faites que… *

Ne terminant pas sa pensée, il se hâta de poser la question qui lui tordait les entrailles à son interlocuteur.

« Yst, ce que je vais vous demander est très important… Une fois que le dragon déchu fût réveillé, il y’a sûrement dû y avoir des incidents macabres, des villages pillés, détruits, alors… Avez-vous entendu parler d’un petit village d’une centaine d’habitants, situé à environ une heure à dos de cheval, au sud d’Yllistol, ayant été détruit ? »

En y réfléchissant un peu, il semblait effectivement presque logique que les portails, pouvant déjà téléporter des personnes d'une dimension à une autre, ou tout autre endroit que celà pouvait bien être, pouvait tout aussi bien happé une personne à une époque et faire en sorte, par une quelconque sorcellerie, que cette même personne, arrive plus tard dans le cross-univers qu'une personne happée bien après elle...

" Je ne sais que dire concernant tout les pans de l'histoire de notre pays que j'ai raté, si je puis dire, il s'est passé tellement de choses en si peu de temps, que l'on en viendrait presque a croire que celà n'est qu'une fable grotesque, mais, autant que vous m'avez accordé votre confiance, je vous accorde la mienne, de plus, votre regard ne semblait pas remettre en question ce que vous disiez, il faudra que vous me racontiez ça plus en détail à l'occasion, car, après tout, il est question de notre culture d'Ylissien. "

S'arrétant sur une petite note de bonne humeur, Kota changea immédiatement d'expression, passant d'un air empreint de joie, malgré les événements réçents, à un air empreint de tristesse et de désespoir, le tout mélangé avec une pointe de solitude...

" J'espère qu'ils vont bien, je crois que vous l'avez compris, j'ai, dans ce village, laissé ma femme, mes deux enfants, et mon précieux destrier, ainsi que plus fidèle ami, Ebène, tout ce qui me rattachait à la vie m'a été dérobé, aussi est-ce pourquoi je voulais savoir si , après les événements qui ce sont passés après mon départ, ils avaient survécus, ou bien, si ils avaient péri des mains des compagnons de ceux que j'ai tués lors de ma veng... "

" Aaarrrgh!!! "

Subitement, un violent mal de crâne assailli Kota, une unique phrase lui était sans cesse susurrée dans le creux de l'oreille.

* Tue-les tous ! Venge-toi de ceux t'ayant tout prix ! *

Après quelques secondes de lutte acharnée contre ce mal inconnu, voulant s'emparer de sa pensée, ainsi que de son être, Kota parvint à repousser ces voix empreintes de colère et de folie.

* Que... Que m'est-il arrivé ? Qu'est-ce donc que ces voix... que tout ça ?! *

Il sentit alors un léger sourire en coin dessiné sur le coté droit de son visage, non pas que celà fût inhabituelle, mais il sentit que cette expression avait quelque chose de malsain, mais ne pouvait deviner en quoi, ne pouvant voir sa tête, il s'empressa de l'enlever, et de reprendre un air normal.

" Je... Je ne comprend pas, qu'était-ce donc que tout celà, que m'arrivent-il ? D'où venaient donc ces voix cherchant à s'emparer de mon esprit... ? "

Kota remarqua le dégoût que son tome noir instigua chez l’épéiste-mage, et ne le compris que trop bien, pendant les années où il avait fomenté sa vengeance, il avait dû s’intéresser de très près au domaine de la magie noire, des rites obscurs, et autres fresques grotesques dépeintes dans les ouvrages touchant à ce sujet, et avait pu, de ce fait, saisir l’ampleur de l’abomination que représentait cet art corrompu, cependant, il continua quand même sur le chemin des rites obscurs, en s’entraînant toujours plus avec son tome « Nosferatu », ce qui lui avait sûrement valu plus d’un cauchemar…

«  Oui, j’y ai été obligé, afin de pouvoir faire payer à tous ceux qui ont détruit mon village natal, car une bonne connaissance du terrain était requise, et puis, après tout, œil pour œil, dents pour dents, non… ? Cependant, je comprends tout à fait votre réaction quand vous avez touché ce livre, après tout, cet art engendre les pires atrocités, après l’homme lui-même du moins… »

Il se pencha pour ramasser « Nosferatu », qui était tombé juste à côté du corps inerte de la disciple, et dont la tombe était en train d’être creusée. En le touchant, il eut peur que les voix tentent à nouveau de lui faire perdre la tête, mais rien ne se passa, Kota resta figé devant la contemplation de ce tome noir pouvant arracher la vie à quiconque, et semant la folie dans son cœur, ainsi que dans son esprit, puis le rangea dans sa sacoche, restée ouverte depuis qu’Yst l’avait pris en toute hâte pour vérifier ses soupçons.

« N’ayez cependant pas de doute concernant mon état d’esprit, je suis parfaitement lucide, je me suis juste servi de la magie noire afin de venger mes parents, je ne suis en aucun cas un membre d’une secte ou quoi que ce soit d’autre, au contraire, je l’ai hais tous autant qu’ils sont, ils pratiquent une barbarie sans nom, pour des motifs inventés de toutes pièces, voulant seulement semer la panique dans les petites bourgades ! »

Ayant appuyé la fin de ses propos d’un ton fort, à cause de la nuit qui lui avait valu sa brûlure, ainsi que les deux cadavres de ses parents, il s'empressa de s'excuser de s’être emporté.

« Excusez-moi Yst, je ne me suis toujours pas remis de ce goût amer que laisse l’impuissance, que j’ai éprouvé la nuit où j’ai quasiment tout perdu. »

A la vue de toute cette gentillesse et de ce sourire qu’affichait Yst, Kota se sentit plus léger, comme si il commençait à y voir plus clair sur ce monde, il n’était sans doute pas aussi hostile que ce qu’il avait cru, mais ça, il le découvrirait au fil de ses aventures.

Yst tendant sa main, Kota tendit la sienne, pour répondre à la seule personne qu’il connaissait dans ce nouveau monde.

« Merci beaucoup de me croire sur parole, je pense que peu de gens pourraient croire ce qu’un inconnu raconte, surtout lorsqu’il est affublé d’un tome noir et qu’il entend, de surcroît, des voix. »

Esquissant un petit sourire à la fin de sa phrase, Kota avait retrouvé sa bonne humeur, tout ça grâce à Yst, un parfait inconnu qui avait su l’écouter et le comprendre, ce qui ne lui était jamais arrivé jusqu’à présent, hormis pour sa douce et tendre femme.

« Vous savez, on ne vit jamais bien ces choses-là, mais je comprends ce que vous voulez dire, il faut prendre du recul, beaucoup de recul même, puis s’y faire au fur et à mesure que le temps passe, c’est difficile à dire, et encore plus à admettre, mais c’est comme ça que je le conçois du moins… Merci de me proposer votre aide, je pense avoir bien besoin de votre soutien dans ce nouveau monde, nous allons pouvoir partir explorer un peu les environs, vous pouvez être mon guide ? »

Lâchant la main d’Yst, Kota regarda le trou, et le cadavre encore jonché sur le sol, il ne put alors s’empêcher de s’esclaffer.

« Tout d’abord, avant de partir explorer les environs, il nous reste quelque chose à faire, que nous avons tenté de terminer à plusieurs reprises déjà ! »

* Mais pourquoi… *

Choqué au premier abord par son indifférence face au cadavre, il se rappela vite de ce que là disciple, et plus globalement, les disciples de Grima, avaient fait à Yst, mais aussi, et surtout, les malheurs qui l’avaient affublés, lui, et ses parents, et sûrement, même si il se refusait de l’admettre, ce qui avait voulu à sa femme ainsi qu’à ses enfants des complications funestes… Il se ravisa donc, et passa à autre chose.

« Merc… »

Kota allait encore le remercier, puis se ravisa, en pensant que trop de remerciements n’étaient pas nécessaires, car Yst avait sûrement déjà compris à qu’elle point il lui était redevable, car sans lui, qui sait ce qu’il aurait pu faire dans ce monde inconnu.

« Uhm uhm… C’est effectivement vrai, entre membre de la fratrie Ylissienne, nous nous devons de nous entraider dans ce monde, isolés de nos comparses. »

Commençant à reboucher le trou, il continua de parler.

« Vous… Non, le « tu » est, effectivement, désormais plus approprié… Tu es bien familiarisé avec ceux vivants ici, ainsi qu’avec les environs ? Et ce fameux tournois, qu’en est-il? Après tout, cet immense bâtiment, c’est le colisée, non ? »