Deux koopas, l'un à la carapace rouge et l'autre verte arpentaient le sentier forestier, guettant le moindre fruit. Ils n'avaient rien mangé depuis longtemps. L'un deux, celui à la carapace verte, trainait la patte. Son ventre se mit à gargouiller...

- J'mangerais bien un champignon à la fraise tellement j'ai faim moi Pipo... dis, on peut pas s'arrêter juste un moment ?

- Un champignon à la fraise ? D'où tu sors ça Koko ?

- Mon estomac qui a beaucoup d'imagination... tien c'est quoi ça là bas d'ailleurs ? C'est rouge on dirait.

- Des champignons à la fraise peut-être ? Il parait que ça pousse beaucoup en cette saison.

- Mais oui vas-y moque-toi de moi... Bon qu'est-ce que c'est... ah bin mince...

- Quoi ?

- On dirait un tapis rouge.

- Attend voir ça. Hé... un tapis rouge avec des bras, une tête et des jambes ?

- Ptet un gros goomba qui s'est écrasé là, comme une grosse merde *SHPLAF* Pis y a tout qu'a foutu l'camp , les tripes et la cervelle et ça s'est étalée de cette façon.

- V'la t'y pas que c'est mou tout ça.

- J'vais toucher pour voir.

*tap tap tap*

- Ah bin non y a pas que du mou, y a aussi de l'os !

- En tout cas on peut pas manger ça, c'est pas comestible.

- Attend on dirait que ça bouge...!

Le corps inerte de Rubis gisait sur le sol humide d'une forêt. Face contre terre, il était à peine conscient et se sentait incapable de bouger.

- J'vais toucher pour voir.

*tap tap tap*

C'est à ce moment-là que Rubis comprit qu'il n'était pas seul.

- Ah bin non y a pas que du mou, y a aussi de l'os !

- En tout cas on peut pas manger ça, c'est pas comestible.

(mais pour qui ils se prennent ces deux là ?)

- Attend on dirait que ça bouge...!

Rubis aurait voulu se lever d'un bond prêt à riposter... mais c'est à peine s'il arriva à lever la tête. Ce fut suffisant pour entrevoir les deux individus:

- Aaaah ! des adamankhelones !  

Tout se mit en place dans l'esprit de Rubis: l'empereur Mateus, le météore sur le village et... le portail vers un autre monde.
D'un coup d’œil furtif, il essaya de scruter les alentours et toisa les deux tortues au dessus de lui.

- Mais où suis-je tombé, soupira le jeune mage à voix haute.

A part les deux mangeurs de salade, ce monde était extraordinairement... normal. L'air était frais et sentait cette odeur typique des forêts, un parfum d'humus et de champignon. En somme, une forêt tout ce qu'il y a de plus banal, une forêt telle qu'on en trouverait dans le royaume de Fynn.
Quant aux deux tortues, on ne pouvait pas en dire autant, elles avaient des yeux immenses à moitié cachés par leur gros nez. Et elles avaient l'air très bavardes...

Les deux Koopas sursautèrent quand ils se rendirent compte que le machin mou et osseux de couleur rouge c'était mis à parler.

- Ah bin ça c'est la meilleure.

- Il nous a traité de "Madame en culotte".

- Non moi j'ai entendu des "Amandes à la carotte".

Son ventre se mit à gronder.

- ...

- Bin quoi j'ai faim !

L'humain regardait à droite et à gauche

- Mais où suis-je tombé.

- On appelle ça une forêt.

- Quelle évidence en effet.

- Et vous ressemblez à rien...

-... que l'on connaisse dans le coin.

- Lui c'est Koko...

- ... et moi c'est Pipo.

- ...

- Bin quoi ?

- Tu te trompes à chaque fois, c'est pas vrai. Moi j'dis "Lui c'est Koko..." et toi tu dois dire "...et lui c'est Pipo".

- Mais si moi je m'appelle Pipo pourquoi je devrais dire "... et lui c'est Pipo" ? C'est con !

- Non puisque TU t'appelles Koko.

- Ah mais oui c'est vrai... donc c'est logique, merci Popo.

- De rien Kikou

Rubis regardait les deux compères totalement incrédule. Puis il se mit à réfléchir...

(De toute évidence, ces deux tortues n'étaient pas des adamankhélones, elles n'étaient pas assez effrayantes ni assez... intelligentes ? Disons pas assez rusées pour ne vexer personne. Bon... c'est pas tout ça, mais je ne sauverai sans doute pas mon monde grâce à Pi... Popo et... Kokou ? Comment pourrais-je connaître leur nom si elles-mêmes ne savent pas comment elles s'appellent ?!)

- Excusez-moi, fit Rubis en espérant interrompre le débat, est-ce qu'il y aurait un grand magicien dans les environs ? Je cherche à développer mes compétences.

- Bah moi j'en connais pas.

- Moi non plus, mais peut-être qu'au Colisée tu trouveras ton bonheur !

- Le Colisée ?... intéressant, il doit y avoir des gens puissants, et parmi eux il y aura bien quelqu'un qui m'aidera...

- Qu'est qu'il a dit ?

- Je sais pas il marmonne dans sa barbe.

- Mais non idiot, il n'a pas de barbe !

- Je disais: où est le Colisée s'il vous plaît ?

- Ah oui, euh c'est à droite, puis tout droit, tu ne pourras pas le louper !

- Mais non c'est à gauche ! Dès que tu quitteras la forêt tu ne verras que ça.

- Ah non je t'assure que c'est droi...

Rubis s'éclipsa discrètement laissant les deux tortues retomber dans leur débat. Très vite il n'entendait plus que des bribes de voix:

- Mais... gauche... abruti !


Le jeune mage esquissa un sourire narquois, entre le dépit et la consternation.

Le soleil était déjà en train de se coucher et la forêt s’assombrissait. Et pour Rubis, il n’y avait rien de plus angoissant qu’une forêt plongée dans la nuit noire. Il était incapable de savoir depuis combien de temps il marchait, une heure ? deux tout au plus. Il n’était même pas sûr d’avoir pris la bonne direction finalement… Inquiet de devoir passer la nuit au beau milieu du bois ténébreux, il accélérait le pas. Et c’est au moment où il s’y attendait le moins qu’il aperçut une lueur à travers les arbres. Il se précipita vers celle-ci, espérant découvrir les lumières du Colisée. Mais ce fut un tout autre spectacle qui se déroulait sous ses yeux. Derrière le rideau de feuilles des derniers arbres de la forêt, Rubis pouvait apercevoir une lune démesurée et son reflet à la surface d’un lac à perte de vue. A la lisière du bois, il s’arrêta un instant pour contempler la scène.