Cette petit fille me complimentait elle aussi. A croire que j'étais vraiment jolie ! C'était rare que l'on dise de mes cheveux qu'ils étaient beaux. Les gens se contentaient souvent de ne rien dire, trop gênés par l'originalité de la couleur. En fait, mis à part Adam et cette fillette, personne ne m'avait jamais rien dit sur mes cheveux. Je ne sais pas trop comment réagir. Souris Akris ! C'est encore la meilleure chose à faire.

Art toussa. Il était vraiment malade, ma parole ! S'il se retrouve dans cet état chaque fois qu'il joue de la musique, je ne donne pas cher de sa peau dans l'arène.

"Ma chère sœur me connaît trop bien."

Sa soeur donc. En tant qu'enfant unique je ne connais des relations fraternelles que ce que j'ai pu lire dans les livres et voir dans les films. Et ces deux-là ont l'air de bien s'entendre.
Le barde nous présenta, moi et sa soeur.

"Dame Akris, ma sœur, Symphonia. Sœurette, dame Akris Leukos."

Art et Symphonia Mélodia... De sacrés aptonymes. La petite Symphonia fit une révérence. Comme c'est charmant ! Je soulevais lègèrement les plis de ma jupe tout en m'inclinant, lui rendant sa révérence comme j'avais vu faire dans les vieux films. La scène avait un certain charme désuet.

"Chère Symphonia, vous pouvez vous targuer d'avoir un frère dont la conversation est des plus agréable. Et de posséder des yeux d'une beauté sans nom."

C'est moi désormais qui joue au grand jeu des compliments. Et il faut admettre que les pâles yeux de Symphonia sont magnifiques. En grandissant, elle deviendra très belle.

Art un cou... ? J'imagine bien la suite. Tout de même, trouver au milieu des guerriers ivres de combats un barde dragueur accompagné de sa petite sœur, ça a de quoi me faire reconsidérer ma définition de "diversité". Cet endroit et les gens qui le peuplent ne cessent de me surprendre, c'est très appréciable. Pas le temps de s'ennuyer Akris !

Tiens, Art tousse à nouveau... Sa main ? Qu'est-ce que...

"Excusez-moi... J'ai pris froid dans la matinée."

Foutaises. Je lui lance un regard des plus sceptiques. Il me prends pour qui ?

"Hum hum."

Il doit être malade mais tente de faire bonne figure je suppose. Il lui faudrait un petit coup de pouce pour qu'il aille se faire soigner. J'ai très envie de l'aider du coup. C'est dans ma nature, j'aime bien aider les gens. Mais mieux vaut ne pas y aller trop brutalement. Si ça se trouve, il veut cacher son état à la petite Symphonia. Je vais essayer de jouer ça finement.

"Vous savez Art, j'en oublie les bonnes manières. Dans mon monde, la coutume veut que l'on serre la main de quelqu'un après avoir échangé quelques mots avec lui."

Wow, c'est foireux comme improvisation. Mais ça peut marcher. Je tends ma main en direction du blond et lui adresse un gentil sourire. Je jette un petit coup d’œil aux alentours pour voir si un médecin est libre, au cas ou Art se mettrait à nouveau à tousser. Et maintenant, il est temps de voir ce qu'Art cache dans ses mains...

Ça passe... Non, il évite et... Ah, merci petite. Tu aides ton frère sans le savoir. Tu pourrais le faire moins violemment tout de même.

Art me saisit la main et je peux sentir quelque chose se déposer dessus tandis qu'il me fait signe de garder le silence... Mes intuitions devaient être bonnes. Je vérifie quand même en faisant mine de remettre en place ma broche. Du sang, comme de juste.

"Vous savez. Tout à l'heure, je me suis tellement acharné sur un morceau de pain que je me suis méchamment mordu. Ça faisait un mal de chien."

"Tu racontes n'importe quoi, Art."

En effet. Mais cela n'allait pas m'empêcher d'aider le barde.

"Vous savez, vous devriez faire un tour du côté des médecins. Il se peut que ce genre de vilaines morsures s'infecte et que cela devienne grave."

Je pris un air plus grave.

"Surtout si ça arrive fréquemment."

En fait, je suis sur le point d'appeler une infirmière pour qu'il aille se faire ausculter en vitesse. Mais ce serait mieux s'il y allait de lui-même.

"Et puis, un valeureux combattant du Colisée comme vous doit s'assurer d'être en bonne santé. N'est-ce pas ?"

Cracher du sang, ça n'est jamais bon signe. Et s'il essayait de le cacher, alors il ne se rétablirait jamais vraiment.

Bon, Art s'incline. Il m'assure qu'il suivra un traitement. J'avoue être moyennement convaincue. Ceux qui s'attachent trop à leur image finissent par en mourir. Il devrait savoir ça, avec son expérience de la vie. Courir la gueuse, c'est bien mais c'est superficiel... Bah ! Il agit selon ses envies. Laissons-le faire, on verra bien ou ça le mènera. En attendant, Carpe Diem !

"Je suis heureuse de vous entendre parler raisonnablement. Le personnel médical d'ici saura bien s'occuper de vous, j'en suis sûre."

Je suppose que j'ai réussi à l'aider. D'une certaine manière. Ça me fait toujours plaisir. Et puis, le duo m'est sympathique. Un rapide coup d’œil à ma montre m'indique qu'il est temps que je quitte les Mélodia si je veux avoir du temps pour lire un peu. Un sourire, une petite révérence.

"Art, Symphonia, ce fut un plaisir. Je dois vous quitter avec regret, mais je ne désespère pas de vous recroiser à l'avenir."

Et sur ce je tourne le dos au mélomane et à sa sœur avant de marcher vers la sortie de l'infirmerie, non sans leur adresser un petit geste de la main au passage.

On se reverra, Art.